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Avis d’expert – Dans un environnement contrasté, les entreprises françaises demeurent saines

En France, à peine refermée la parenthèse enchantée des Jeux olympiques organisés un an plus tôt dans la Ville Lumière, s’ouvrait une longue période d’incertitude. Politiquement, bien sûr. Economiquement également, non pas avec une crise, mais avec des signes avant-coureurs d’une dégradation de la conjoncture qui ont pris les traits de délais de paiement en progression, d’un niveau élevé de défaillances d’entreprise (+ 17 % pour l’ensemble de 2024), de carnets de commandes moins garnis dans l’industrie, le bâtiment et certains services, et, côté financier, de prêteurs plus sélectifs et/ou moins diligents.


Des signes d’optimisme malgré tout

Il faut pourtant inviter à l’optimisme, cela en dépit des mauvaises nouvelles d’ordre économique et politique en provenance des Etats-Unis (droits de douanes notamment) et de la Chine, pour ne citer que ces deux exemples évidents.

En Europe par exemple, la baisse de l’inflation à des niveaux normaux s’accompagne de signes positifs sur la consommation. C’est notamment ce que suggère la fréquentation de certains centres commerciaux en France. Serions-nous en train de dépasser la crise du retail, particulièrement douloureuse en France, notamment dans des secteurs comme l’habillement ?

 La baisse des taux directeurs par la Banque centrale européenne, même très progressive, devrait avoir de nombreux bénéfices, dont celui de finir par avoir raison de la grave crise immobilière qui nous a touchés, comme l’atteste la reprise des crédits à l’habitat (presque 10 milliards d’euros en janvier).


Des entreprises en bonne santé

Il est bon aussi de rappeler que la situation des entreprises françaises demeure globalement bonne, grâce à des conditions de financement satisfaisantes et à un écosystème financier à la fois complet et de qualité.

Globalement, leur endettement n’est pas inquiétant. A 79 % du PIB, il est élevé en brut ; mais minoré de la trésorerie disponible, il se situe à 39 % et n’est pas éloigné de ce que l’on observe en Allemagne (31 %) ou aux Etats-Unis (35 %). Les PME, elles, n’ont pas cessé de renforcer leurs fonds propres jusqu’à la crise sanitaire : ces derniers représentaient plus de deux fois l’endettement brut fin 2019. Et aujourd’hui, le niveau de trésorerie de ces entreprises est plus élevé qu’avant la pandémie. Même les entreprises zombies (celles de plus de dix ans dont l’excédent brut d’exploitation ne couvre pas les charges d’intérêts pendant trois années consécutives) ne constituent pas la bombe à retardement que l’on a pu annoncer : elles sont de plus en plus nombreuses à redevenir viables, indiquait France Stratégie en 2023.

 Pour ce qui est de la distribution du crédit, la situation s’améliore : en janvier, la croissance en rythme annualisé de l’encours de crédits bancaires s’élevait à 2,3 %, alors qu’elle était de 1,3 % un an plus tôt. Quant au coût de financement, il profite de la baisse des taux d’intérêt et n’a pas cessé de baisser depuis novembre 2023 pour se situer à 4 % en janvier (toutes maturités confondues). Les conditions de financement sont d’ailleurs plus favorables que dans la plupart des pays européens, grâce notamment à la concurrence que se livrent les établissements financiers. Les entreprises françaises ont à leur disposition non seulement des banques françaises bien notées, mais aussi de nombreuses banques internationales de premier plan, une industrie de la gestion d’actifs puissante et diversifiée, ou encore des prêteurs alternatifs très dynamiques.


Structurer son bilan pour affronter les changements stratégiques

Mais ne soyons pas naïfs, le niveau de risque et d’incertitudes est évidemment élevé. Dans cet environnement très contrasté, et même si elles sont en bonne santé, les entreprises se doivent d’être attentives aux moyens et ressources permettant d’assurer leur croissance et leur pérennité. Leur capacité à encaisser des chocs exogènes doit plus encore qu’auparavant être modélisée au travers d’une analyse financière approfondie.

N’ayant pas le droit à l’erreur quand il s’agit, par exemple, d’effectuer un investissement stratégique, elles ont besoin d’un accompagnement global et à 360 degrés combinant le diagnostic (y compris de gouvernance familiale), le conseil et l’intermédiation, et qui s’intéressera notamment aux sources de financement, à la répartition entre les fonds propres et la dette, aux maturités, au choix des co-investisseurs, et en particulier à la place accordée à des fonds d’investissement, et/ou à des familles d’entrepreneurs qui redéployent leur capital auprès d’autres chefs d’entreprises.

Le niveau élevé d’incertitude économique ne doit pas constituer un prétexte à l’immobilisme. C’est souvent en investissant en bas de cycle, avec clairvoyance, qu’on fait les meilleurs choix. C’est pour cela qu’il faut continuer à investir en minimisant les risques grâce à une ingénierie financière mûrement pensée.

Olivier Chereau – Associé Gérant